Rapport d’Information | Projet de loi pour une République numérique

Rapport d’Information | Projet de loi pour une République numérique

16 décembre 2015 – Le projet de loi pour une République numérique présenté mercredi 9 décembre par la secrétaire d’État chargée du numérique, Axelle Lemaire, est issu d’un ambitieux processus de co-écriture citoyenne.

Dès octobre 2014, une grande concertation nationale a été lancée par le Premier ministre. Plus de 4 000 contributions d’entreprises, d’administrations et de particuliers ont été reçues et synthétisées par le Conseil national du numérique, qui a remis au Gouvernement ses conclusions le 18 juin 2015. Un pré-projet de texte a ensuite été élaboré par le Gouvernement puis soumis à une consultation publique en ligne, qui a donné lieu à plus de 8 500 contributions et près de 150 000 votes.

Cette démarche participative doit être saluée : elle rappelle que le numérique est un outil puissant pour penser différemment les grands problèmes sociaux actuels, qui permet aussi de repenser notre manière de faire de la politique.

Ce projet de loi numérique s’inscrit dans un environnement européen en pleine mutation.

Aujourd’hui, l’Europe paraît à la traîne de la révolution numérique, et peine à faire émerger de véritables « champions européens », capables de concurrencer les leaders américains et asiatiques dans ce secteur. Mais le cadre règlementaire européen nécessaire à cette révolution numérique se trouve aujourd’hui à un tournant majeur.

Des principes fondateurs sont désormais consacrés par le droit européen, ou sur le point de l’être, comme la « neutralité d’internet » ou le « droit à l’oubli ».

Le règlement européen relatif à la protection des données personnelles, présenté par la Commission européenne en 2012, est sur le point d’être adopté : il permettra des avancées majeures pour les droits fondamentaux dans ce nouvel univers numérique.

L’Europe constitue aujourd’hui l’échelon optimal pour encourager et encadrer ces nouveaux modes de production, de consommation, de création, car le numérique n’a que faire des frontières. Face à la puissance de start-ups devenues des multinationales comme Google, Amazon, Facebook ou Apple – les fameux « GAFA » -, seule l’Union européenne a la taille critique pour agir comme le médiateur d’un internet ouvert et respectueux des droits de l’individu. Se contenter de légiférer au niveau national n’aurait pas véritablement de sens, et risquerait de désavantager les entreprises françaises par rapport à leurs concurrentes européennes : l’horizon final d’une règlementation numérique efficace et ambitieuse doit être européen.

La nouvelle Commission européenne l’a compris : elle a fait du numérique l’une de ses priorités et a présenté, le 6 mai 2015, une nouvelle stratégie numérique.

Le projet de loi présenté par le Gouvernement doit contribuer à renforcer cet élan européen, en stimulant le débat public autour de ces sujets mais également en jouant un rôle de précurseur, en dessinant les grandes lignes qui pourraient servir de base à la future règlementation européenne, de la même manière que la loi CNIL de 1978 a inspiré les grands principes de la directive de 1995 sur la protection des données personnelles.

De nombreux sujets abordés par le projet de loi sont liés directement ou indirectement au droit européen. Dans un souci d’efficacité et de sécurité juridique, la bonne articulation entre les dispositions proposées par ce projet de loi et celles en vigueur – ou à venir – au niveau européen est donc cruciale.

Le Gouvernement en est pleinement conscient. Dès septembre, la secrétaire d’État a informé les deux commissaires européens en charge du numérique des principales dispositions du texte soumis à la consultation par courrier, avant de se rendre à Bruxelles, pour présenter, entre autres, les principaux axes du projet de loi à la Commission européenne et au Parlement européen (le Gouvernement a également notifié ces mesures dès le 10 novembre à la Commission européenne : un délai dit de statu quo est ouvert pendant trois mois – éventuellement prolongeable de quatre mois, durant lequel les mesures notifiées ne sauraient être adoptées).

C’est pour cette même raison que la commission des Affaires européennes a décidé de formuler des observations sur ce projet de loi, en application de l’article 151-1-1 du règlement de l’Assemblée nationale.